söndag, juli 15, 2007

Pan ! t'es mort

La fin du Labyrinthe de Pan me laisse... frustré de ma victoire. Frustré de mon film. Il ne va pas. Ca ne va pas. Il y a quelque chose, bien au-delà de toutes ses qualités que soulignent les critiques, au-delà des vingt-deux minutes, mille trois cent vingt secondes d'applaudissement que Cannes a offert à la projection, bien au-delà de toutes ses remarques tout à fait crédibles et intelligentes, très bien tricotées, que toutes les sommités de la review cinématographique ont chanté au sujet de ce film, de son réalisateur, de ses couleurs, de ses sons, de ses personnages... Au-delà ? Non, non, pas au-delà : en-dessous. Il y a quelque chose, en-dessous de tout ça, qui me ronge à l'intérieur. Ou plutôt je me corrige encore : il n'y a pas quelque chose en-dessous de tout ça qui me ronge. Il y a en-dessous de mon esprit, vers le bas de mon esprit, qui se révolte, et qui fait que ce film me ronge. Une racine en moi. Une fibre primaire.
Ca me... met presque en colère, ce film.

"La réalité est terrible, les enfants ont bien de la chance puisqu'ils sont assez cons pour s'enfuir dans des univers surfaits et freudiens qui leur font passer le temps. D'ailleurs, quesqu'ils ratent, puisque quand ils meurent ils rejoignent leur putain de monde alors que les adultes, eux, se coltinent la réalité. Ah ! et au fait : il n'y a pas d'issue à la réalité."
...
Et j'aimerais avoir une pensée pour nos chers amis qui sont venus réalité.
Johnson passe à Edwards qui réalité relance sur l'autre réalité aile pour Briggs et réalité.
Mixez les carottes et les navets réalité et incorporez-y la crème réalité et puis réalité, réalité.
Bim bam réalité tsioui réalité zaoei zeoirnh réalité er aiunbre iunezr réalité breonoin réalité papapa réalité réalité réalité réalité réalité réalité réalité réalité réalité.

Il n'y a que la réalité dans ce film. Juste, seulement, que la réalité. Et d'autant plus que la fille essaye d'y échapper. Il y a toujours la réalité, la réalité, la réalité jusqu'à la nausée. Plus loin même, c'est une présentation d'autant plus factice et cruelle de la réalité qu'un fantastique faiblard et fuyant est là pour la réhausser. Ce film c'est comme son sadique méchant (le génial Sergi Lopez), qui met en jeu un impressionnant jeu sadique, qui sadiquement permet à un bègue de s'échapper s'il ne bégaie pas, et sinon il sera sadiquement mis à mort. Dilemne intéressant que de rapprocher la délivrance du prisonnier, en dans le même temps lui faire éloigner lui-même cette délivrance parce le fait même qu'il s'en rapproche. Je redis ça : plus il se rapproche de cette délivrance, plus il est nerveux, et plus il est nerveux, plus il s'en éloigne.

Et donc ce film c'est ça : plus le spectateur veut se délivrer de la réalité, plus il essaie de se plonger dans le fantastique. Et plus il essaie de se plonger dans le fantastique, plus son esprit est ramené, plongé, traîné, désarticulé dans la réalité. D'ailleurs la délivrance est futile : le film se termine sur la réalité, par sur le fantastique. D'ailleurs il avait commencé par la réalité.
Dans ce combat-là, qui occupe la plupart du film (on ne se penche pas trop sur le combat d'une nation entière contre elle-même), le fantastique n'a même pas l'illusion de pouvoir dire son mot. Il n'est là que prostré, maîtrisé, au service d'un discours sur la mocheté de ce qu'il y a. Et je ne dis pas qu'il faudrait fuir la réalité dans le fantastique, c'est pas la question. Je questionne : quel est l'intérêt de condamner le fantastique aux yeux de tous en le mettant en scène dans un combat déloyal ? Le réalisateur est mexicain mais je trouve ça espagnol : ce film c'est une corrida. On admire le fantastique, on le trouve beau, poétique, impressionnant, on se fait peur en le voyant, comme ça, pour le plaisir, on le respecte du menton, on fait des jolis textes parce que hein, la Trrrradition, mon vieux, l'écccclat des moooondes meeeerveilleux où se peeerdent les enfaaants ; et puis bon quand même... il est là pour se faire buter, buter de la manière la plus jolie qui soit, mais buter. Il est là pour crever, le fantastique. Bien guidé, bien contrôlé, sous surveillance, d'ailleurs s'il ne se comporte pas comme prévu, on le fait sortir de l'arène et là sa mort est beaucoup moins glamour.

C'est ça, ce film : c'est une mise à mort glamour du fantastique sous les yeux ébaubis d'un public réalitaire. Et puis on y reviendra le dimanche, quand on aura la tête à ça, on viendra le voir se faire taillader la nuque, tendre la langue, se battre contre un professionel de l'abattage dans un combat qui n'est pas le sien.

C'est bon, ça. Ca mérite bien vingt-deux minutes de clap clap. Comme à l'arène.

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