lördag, augusti 04, 2007

America's Sweethearts : la malédiction

Je suis maudit. C'est une malédiction tout à fait spéciale et ciblée : les films que j'aime sont assez mal notés, voire très très mal notés, par la critique ; que ce soit la critique populaire sur l'Imdb, ou la critique professionnelle sur Rottentomatoes.com. Non que ça m'empêche de les aimer, ou au contraire que ça me force à les aimer du genre rebel-rebel, d'ailleurs des fois je change mon opinion sur un film après avoir lu un avis contraire au mien. Mais ça me fait poser des questions, un, sur les critiques (réflexe commun : quand je suis pas d'accord avec les autres, toujours mettre en doute les autres d'abord), deux, sur mes goûts.

Pasque ça voudrait dire que j'aime pas ce qu'aime les gens qui regardent plein de films. Pasque ça veut dire que peut-être je n'arrive pas à voir certaines choses. Peut-être que je manque.

Prenons un exemple : comparons America's Sweethearts et My Best Friend's Wedding. AS fait 5,6/10 à l'Imdb, et 31 % chez Rottentomatoes. MBFW fait 6,2/10 à l'Imdb et 76 % chez Rottentomatoes.

Sur MBFW, je vais pas en dire beaucoup. Il y en a déjà un peu ici. Grosso modo, Julia Roberts n'arrive pas à être convaincante en femme méchante (à cause de son petit regard de biche affolée), Cameron Diaz n'arrive pas à être attachante (elle fait *vraiment* crétine et pleurnicheuse), Rupert Everett, qui s'amuse, lui, repose sur un humour guignol de fofolle, les deux soi-disant garces qui pouvait servir de comic relief n'y arrivent pas (même la langue collée à un kiki glacé), le héros est tout à fait fallot à cause de sa gueule figée dans un sourire tordu du genre bogoss des années 1880s, et les Grandes Scènes Mémorables (le karaoké, la chansonnette dans le restau, le mariage dont on ne sait pas s'il va se réaliser ou pas) sont pas naturelles, un peu vite passées, et sans grande valeur de revisionnage.

Sur AS, je vais m'étaler un peu plus.

D'abord, je trouve le thème marrant, un peu plus que l'autre bien qu'il était bien trouvé aussi : un agent publicitaire pour un film doit garder un couple de stars en cours de divorce dans un même hôtel le temps de la présentation du film à la presse, alors que la bande n'est toujours pas parvenue au studio. On a là quatre personnages principaux : Billie Crystal, comme à son habitude homme responsable et confiant avec un petit queutchose de gamin, qui glisse d'un air détaché des remarques du genre "Word of advice. When you hit the formica, stop" et "no laugh, no tip". Julia Roberts en soeur effacée et blessée, ça fait plaisir de la voir si hésitante, naturelle et rigolote à être dans le pâté, à bâiller en tricotant, en se réveillant en sursaut dans le lit d'un autre, et sa transformation dans les flashbacks est stupéfiante. Elle est plus à sa place que dans le rôle de salope manquée dans MBFW. En comparaison, le jeu de Catherine Zeta-Jones en actrice totalement imbue d'elle-même, tyrannique et insensible, est superbe. On la méprise, on la hait, c'est très bien joué. Petite citation de son personnage ? En parlant de sa soeur : "She was so much more fun when she was fat". En parlant d'elle-même "Don't you know the stress i'm under ? Everybody hates me. Everyone wants a piece of me. My therapist is out of the country. I wasn't nominated for a golden globe this year !". Et enfin John Cusack, l'air toujours sur la défensive, dépassé par les événements, avec son look de rocker balourd qui fait tout le charme de High Fidelity. J'approuve particulièrement la facilité et la saveur qu'il arrive à mettre dans ses petites vannes que la plupart des acteurs s'ingénient à poser (à faire la pose). Par exemple un "i can feel my nose in the back of my throat. Is that bad ?" ou "I'm fine. I look like half a raccoon".

Et le film, à mon goût, repose bien sur cette base de comédie de dialogues, avec une foule de petites remarques amusantes, rigolotes ou même franchement marrantes. C'est bien écrit, mais c'est surtout les acteurs qui les servent bien, sans les forcer, sans mettre chaque petit mot en exergue comme si c'était sur lui que reposait toute la scène. Parce que les scènes reposent aussi sur le jeu, les attitudes. En plus de ces gens-là, on a un Stanley Tucci totalement flippé vraiment naturel en petit chauve lunetteux explosif (pas du tout styliste), Hank Azaria pas à sa place en latino macho (mais ça passe... dis donc, c'est pas en faisant les voix des Simpsons qu'on a des bras comme ça ! tiens il a commencé dans Pretty Woman lui...), un petit rôle pour Alan Arkin, le grand'pa de Little Miss Sunshine, un petit rôle pour Seth Green, l'un des deux frères de Rat Race et le fils du Dr Evil d'Austin Powers, et enfin un petit rôle, à la fois intraitable comme on le connaît et comique, pour Christopher Walken. On a même des relents de jeu théâtral dans les relations entre Seth Green & Crystal, ou les pétages de plomb de John Cusack (parler de threesome pendant l'interview est vraiment terrible).

On a même engagé les services de Larry King et d'une dizaine de célébrités de la presse cinéma US. Parce que le film parle aussi de ça : de la promotion, de la duplicité naturelle des acteurs (les masques de Zeta-Jones ou "c'est une ligne d'un de tes films ? -- non c'est une ligne de moi"), du job d'agent ou de journaliste cinéma. Et un infime message sur le cinéma-mensonge.

Avec ça ça reste une comédie romantique, avec des petits moments mignons (le coup du collier est parfait, rapide et bien trouvé, sans douleur, on remarque même pas que c'est de l'eau de rose) et une fin qui, bien que surprenante (c'est vrai, je l'avais déjà vu et ça m'a encore surpris cette fois-ci), n'en est pas moins happyendeuse.


Donc voilà : j'aime beaucoup America's Sweetheart, je le trouve intéressant et relativement honnête, mais surtout drôle, plein de petites vannes. Alors pourquoi My Best Friend's Wedding est-il mieux noté ? Parce que ses agents de promotion avaient versé plus de pots de vin à la presse cinéma ? Parce qu'il est plus romantique ? Ah mais non ! partout tout le monde crache sur le côté romantique, le côté chick flick. Alors quesqu'il a de plus ?

La mode. C'est ça mon hypothèse : c'était plus à la mode de dire du bien de MBFW quand il sortait, et moins à la mode de dire du bien de AS quand il sortait. Juste ça. Les journalistes écrivent pour être lu, on se doute qu'en définitive une note de film est personnelle et dépend beaucoup de goûts personnels, et donc la presse cinéma donne une note selon l'humeur du moment de leur lectorat, ou du reste de la presse. Si vous êtes le seul journaliste à dire qu'un film est bien, tout le monde pensera que vous êtes un mauvais journaliste. Alors on sent un peu l'air du temps, et on écrit en fonction.

Mais je suis peut-être le plus mauvais journaliste du lot, et il n'y a vraiment aucune raison de préférer America's Sweetheart.

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